Innovation
Grenoble construit son premier immeuble bois de grande hauteur

Les immeubles en bois de grande hauteur arrivent en France. A Grenoble une opération pionnière sur huit niveaux va être engagée dans la Zac Flaubert. Elle a été présentée lors d'une conférence organisée par Créabois.
Grenoble construit  son premier immeuble bois de grande hauteur

Très peu ont déjà poussé. Mais les immeubles en bois de grande hauteur vont rapidement se faire une place dans les programmes immobiliers des grandes villes. Un en région parisienne, deux à Bordeaux et bientôt un projet de huit étages à Grenoble, dans la Zac Flaubert.

Les premiers éléments ont été révélés lors d'une conférence organisée par Créabois* à Voreppe en mai dernier.

Actis, le bailleur social isérois prévoit de construire 56 logements collectifs en bois. « C'est un projet ambitieux », reconnaît son directeur Pierre Payard, mais le maître d'ouvrage dit « creuser son sillon ».

Comme souvent en architecture, la commande publique est pionnière. C'est le cas dans la conception de ces immeubles que seule la technologie CLT, du bois lamellé collé croisé, permet d'ériger en hauteur.

Le bailleur social s'inscrit dans la réalisation en bois depuis 15 ans. Bâtiments tout en bois ou mixtes bois béton ont fait leurs preuves autant en qualité d'usage qu'architecturales. « Nous souhaitons travailler encore plus le bois et les matériaux bio sourcés », déclare le directeur qui s'apprête à investir plus de 10 millions d'euros dans ce projet novateur pour Grenoble.

Deux bâtiments

Pour la construction de ce bâtiment de 27 mètres de hauteur, Actis a lancé un concours de maîtrise d'œuvre fin 2015.

Pour obtenir une « cohérence d'ensemble » le cahier des charges précise que le bâtiment sera passif, réalisé avec le maximum de matériaux bio-sourcés et le plus de bois possible et qu'il présentera une qualité d'usage.

« 60 équipes se sont portées candidates, 20 dossiers ont été retenus pour leur capacité à répondre à nos attentes et quatre réponses se sont distinguées pour leur qualité », précise Pierre Payard. Le lauréat est le cabinet 17C à Barraux, qui s'est récemment illustré pour la reconstruction en CLT du refuge de l'Aigle dans le massif des Ecrins. « De nombreuses réponses utilisaient la technologie CLT », précise Pierre Payard.

Esquisse du bâtiment de logements collectifs en bois R+8 proposée par le cabinet 17C.
Les architectes, qui ont répondu en association, ont proposé un projet constitué de deux bâtiments reliés par une cage d'escalier évidée commune. « C'est le symbole du projet, indique le directeur d'Actis. Ce n'est pas facile en logement social de mettre du soleil dans les cages. »

Une partie du bâtiment sera en R+5 et l'autre en R+8. Il sera recouvert de zinc dans un souci d'esthétisme et de durée dans le temps. Les pièces en bois seront apparentes dans les creux.

Des chantiers plus rapides

Reste maintenant à savoir « comment la filière bois va se mettre en marche pour faire du CLT ? », ainsi que se le demande le directeur d'Actis.

« Il existe des fabricants de CLT en France, réplique Claire Delœuil, présidente de l'association CLT France et responsable de développement de l'entreprise Sacba (47) positionnée sur les chantiers en grande hauteur du Sud-Ouest.

L'idée à creuser est celle d'un bois local qui pourrait être lamellé-collé croisé ailleurs.

« Notre objectif est de profiter des opérations qui se profilent, explique l'architecte Jacques Félix-Faure. « Nous souhaitons offrir des débouchés à vos produits tout en réalisant des chantiers plus rapides, plus propres et moins bruyants », reprend le maître d'ouvrage.

David Bosc, dirigeant de l'entreprise SDCC à Varces, fortement positionnée sur la commande publique pour la construction en bois local, constate que « l'arrivée du CLT va vite » et « qu'il y a une réelle volonté de la filière bois française d'y aller. C'est une question de temps et de mise en place ». L'entreprise, qui compte 50 salariés pour un chiffre d'affaires de 18 millions d'euros, s'est regroupée avec sept constructeurs français pour relever ces nouveaux défis. « Nous souhaitons apporter sur de tels projets une réponse financière et technique en mutualisant nos bureaux d'étude et nos ateliers », complète le dirigeant.

Isabelle Doucet

*Créabois : réseau interprofessions forêt-bois.

 

Le CLT, la force de l'épaisseur

La technique arrive d'Allemagne et d'Autriche.
Les panneaux bois de lamellé-croisés, aussi appelés CLT pour cross laminated timber, ont ouvert de nouveaux horizons constructifs. Ils répondent aux exigences des réalisations de grandes portées ou qui nécessitent d'importantes épaisseurs. Ils sont utilisés pour les murs et les planchers. La technologie est requise pour les immeubles en bois de plus de trois niveaux.
Ces panneaux massifs sont constitués de couches de planches empilées, croisées et collées. Epais et de grand format ils comptent plus de trois couches. Le nombre de plis est forcément impair.
Les panneaux CLT sont préfabriqués en atelier et s'adaptent aux plans architecturaux grâce aux outils à commande numérique, ce qui réduit la durée des chantiers.
Il sont considérés comme une alternative au béton tant le CLT présente des qualités de résistance structurale. Il garantissent également de très bonnes performances thermiques et acoustiques et grande résistance en situation d'incendie.
Il n'existe pas encore de filière de production en Rhône-Alpes car les chantiers sont encore d'exception. Les acteurs de la filière bois s'accordent à penser qu'il convient avant tout d'optimiser les outils industriels déjà existant.
ID

 

 

Le bois de grande hauteur

Le Gouvernement devrait déposer ces jours-ci un appel à manifestation d'intérêt (Ami) pour la construction d'immeubles bois de grande hauteur (plus de 10 niveaux).
Ce programme s'inscrit dans le cadre de la politique de la Nouvelle France industrielle et devrait permettre d'identifier une dizaine de territoires qui pourraient accueillir de telles réalisations.
Un concours architectural pour la construction des ces immeubles fera suite à cet Ami.

 

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