Au Mottier, en Isère, Sandrine Delegue et Cédric Moyroud ont développé une activité des pressage de fruits et de distillerie qui a séduit l'assureur Groupama dans le cadre du Prix de l'Excellence agricole et rurale.
Un coin de vie autour de l'alambic

Rutilant, tout en cuivre dans son écrin de bois, l'alambic de la distillerie de l'Alambic, au Mottier fait bouillonner le cœur de ce village des Terres froides.

Difficile de résister à l'envie de s'approcher lorsqu'il y a de l'agitation du côté de la grange située rue de l'Alambic, bien entendu.

Sandrine Delegue et Cédric Moyroud ont mis le doigt dans l'engrenage lorsque ce dernier a repris l'activité de bouilleur ambulant de Louis Boiton.

L'antique machine « est un alambic avec trois vases de 300 et 400 litres, explique Sandrine Delegue. Il y a trois ans, nous avons fait le constat que les clients nous demandaient de distiller des quantités de plus en plus petites d'eau de vie. Nous avons décidé d'acheter un alambic plus petit. »

 

Le nouvel alambic permet de distiller de petites quantités.

 

L'histoire se poursuit dans les salons professionnels en Allemagne où le couple découvre toute une tradition de pressage et de distillation de fruits. « Nous avons choisi un alambic moderne, avec un seul vase de 120 litres et nous avons réalisé le hangar pour le mettre à l'abri. »

Presser, distiller

A l'origine, l'alambic ambulant devait aussi trouver sa place dans le nouveau local, mais il a été doublé par une autre production

« Dans les salons, nous avons vu beaucoup de machines de pressage de pommes car il est courant que cette activité soit couplée avec la distillation. Les déchets de pommes peuvent être recyclés pour faire une eau de vie neutre », poursuit Sandrine Delegue.

Le couple se décide rapidement, développant désormais une activité de bouilleur et une autre de pressage de fruits.

Depuis deux ans, le nouveau local ne désemplit pas à l'automne, si bien que Sandrine Delegue et Cédric Moyroud mettent en suspens leurs activités respectives de service à la personne et de paysagiste.

C'est le temps des pommes. « Nous recevons beaucoup d'appels », poursuit la transformatrice, qui tient un agenda très serré.

Leur matériel répond en effet à une forte demande de pressage pour des petites quantités de fruits, à partir de 100 kg. Particuliers et producteurs trouvent ainsi une solution qui leur évite de faire presser dans d'autres départements.

Place aux pommes

A leur arrivée, les fruits sont lavés, broyés, pressés. Le jus est ensuite filtré, aspiré, passé à la centrifugeuse où la pulpe est séparée, puis pasteurisé à 80° avant d'être embouteillé.

Les tourteaux de pommes sont récupérés par un éleveur pour ses bêtes qui en raffolent.

Les journées de 12 heures s'enchaînent tout le mois d'octobre, dans une ambiance conviviale où chaucn met la main à la pâte. « Et cette année, il y a eu beaucoup de pommes ! », plaisante Sandrine Delegue.

 

Sandrine Delegue à la chaîne de pressage.

 

A la fin octobre, l'activité de pressage cède la place à l'alambic. Le temps de la distillation est moins bruyant et plus odorant.

Cerises et prunes ont ouvert le bal, puis ce seront les poires, les coings, les pommes qui donnent l'alcool de base pour le vin de noix.

La petite entreprise est presque dépassée par son succès.

« A l'origine, nous avons conçu le local pour l'alambic, mais le gros alambic ambulant s'est retrouvé dehors pour laisser la place aux pommes. »

C'est un bâtiment construit tout en bardage bois avec des arbres coupés et sciés spécialement pour les propriétaires. Ils ont limité l'achat de matériaux, hormis pour l'isolation.

« Nous sommes près de la forêt. Nous souhaitions faire quelque chose de joli et dans notre esprit. »

Le bois domine jusqu'au nouvel alambic alimenté au bois. L'insertion paysagère, l'esprit campagne n'empêchent pas la modernité. « On a fait tout aux normes. On peut tout nettoyer à grandes eaux, tout est étanche », indique Sandrine Delegue.

Les évacutations de fumée, l'emprise autour de l'alambic, tout a été pensé dans le respect des normes de sécurité.

Isabelle Doucet
Prévention / L'assureur Groupama a particulièrement apprécié l'état d'esprit qui a prévalu dans la conduite du projet de ce bâtiment à vocation artisanale.

Un projet pertinent et novateur

« Nous avons décidé de façon collégiale de distinguer la distillerie de l'Alambic comme notre lauréat du Prix de l'Excelence agricole et rural de Terre dauphinoise », déclare Emmanuel Berthier, référent agricole départemental de Groupama.
Nous avons choisi une entreprise issue du monde agricole et répondant à des critères d'innovation, mais aussi de prévention. Nous avons trouvé le projet de la distillerie pertinent et novateur.» Le local et son architecture ont séduit l'assureur, ainsi que l'esprit du projet.
« Avec leur slogan "C'est moi qu'il l'ait fait", il y a un côté authentique », souligne Emmanuel Berthier. « La distillerie et la production artisanale de jus de fruits sont peu développés dans le secteur. C'est une démarche qui nous a plu d'une part par sa dimension locale et par le fait de proposer à des particuliers ou des professionnels de participer à la réalisation de leur produit. »
Groupama a également voulu valoriser un projet qui a su s'intégrer au paysage, « avec des aménagements pensés de façon intelligente et qui apportent de la convivialité ».
D'autant que le bâtiment accueille régulièrement du public et que Sandrine Delegue et Cédric Moyroud ont spontanément fait appel à un expert en prévention afin d'identifier les points à risques.
« On aimerait voir se développer de telles démarches au sein des entreprises agricoles », souligne Emmanuel Berthier. Le passage d'un préventeur, qui fait le tour de l'entreprise, est proposé au moment de l'installation, d'un aménagement ou d'un changement de statut.
« Cela fait écho au document unique, mais il y a encore beaucoup d'exploitations où la sécurité n'est pas optimisée », mentionne Emmanuel Berthier.